‘Il faut distinguer les mouches de la viande’ dit un dicton russe repris par Vladimir Poutine à propos des relations russo-biélorusses.
Selon le Président russe, l’union ‘de peuples si proches doit être réalisée sur des bases claires dans le cadre d’un Etat unique’, plus explicite encore : » Cela signifie qu’il ne doit y avoir ni Douma russe, ni Parlement biélorusse mais un parlement unique, un gouvernement unique, un unique pays « . Ces propos tranchés du président russe lors de sa dernière rencontre avec le président biélorusse, Alexandre Loukachenko marque un sérieux refroidissement des relations entre les deux Etats. En effet, Alexandre Loukachenko ne cache pas qu’une telle union est loin de satisfaire ses ambitions. Le président biélorusse souhaitait la formation d’une confédération où la Biélorussie maintiendrait sa souveraineté et le droit de veto sur les décisions russes. Surtout, Alexandre Loukachenko espérait pouvoir un jour se présenter aux plus hautes fonctions de l’Etat russe. Cette perspective évanouie, le président biélorusse a perdu tout intérêt vis-à-vis de l’union et annoncé qu’il défendrait la souveraineté biélorusse comme la prunelle de ses yeux. Le journal Nezavissimaïa gazeta rappelle que, depuis plusieurs mois, derrière les grandes déclarations sur l’union des deux pays, se cachaient de profonds désaccords. » Dorénavant, la politesse est mise de côté et à Minsk des voix s’élèvent pour critiquer ouvertement le président russe. Selon elles, ce n’est pas la Russie mais les Etats-Unis qui font leur politique vis-à-vis de la Biélorussie à travers le président russe « . En réalité, explique le quotidien » l’union a depuis le début été une idée née de la conjoncture politique. Une idée bien pratique : l’activation des pourparlers autour de l’union a toujours rapporté à leurs initiateurs un ou deux pour cent des suffrages électoraux tandis que les problèmes pouvaient aisément être expliqués par l’indécision du partenaire sur qui il était facile d’appliquer ses propres erreurs. Toutefois, tôt ou tard, ce spectacle devait finir par ennuyer les spectateurs qui ont cessé de prendre au sérieux toutes ces danses rituelles « . Parallèlement, les chemins de Minsk et Moscou ont pris des directions de plus en plus distinctes : la Russie force son rapprochement avec l’Occident tandis que la Biélorussie à l’inverse mène une politique de plus en plus anti-occidentale. Le Kremlin déclare une poursuite de la libéralisation de son économie tandis que Minsk renforce la planification de son économie. Enfin, Moscou a fini par renoncer à son projet d’installer un nouveau gazoduc à travers la Biélorussie, préférant avoir affaire à l’Ukraine dont la politique est plus prévisible. Finalement, l’amitié avec Alexandre Loukachenko apparaît comme une tare dans les relations russo-européennes, d’autant plus à la veille de grands pourparlers sur le statut de Kaliningrad. La Russie a donc tout intérêt à s’éloigner de son frère slave. Le pouvoir biélorusse sera donc bien seul s’il perd l’appui de la Russie. » Si l’on ajoute à cela la situation difficile de l’économie biélorusse, Alexandre Loukachenko aura bien du mal à maintenir son pouvoir. Son régime s’éloigne trop du modèle des relations russo-européennes, de tout le processus de développement au sein de la CEI et de la Russie » conclut le journal Nezavissimaïa gazeta.
Nezavissimaïa gazeta 24-06-02 ; 26-06-02
0 commentaires